Julien est technicien forestier pour la Coopérative forestière du nord (COFNOR). Passionné par la forêt, il nous parle de son métier très varié.
En quoi consiste votre métier de technicien forestier ?
C’est assez varié, il y a plusieurs missions différentes mais principalement du conseil et de la gestion auprès des propriétaires privés. En tant que technicien forestier, je travaille dans une coopérative forestière. Les propriétaires qui ont besoin de conseils de gestion, d’interventions spécifiques font appel à nous et nous sommes là pour répondre à leurs besoins et faire les prestations nécessaires.
Qu’est-ce qui fait que vous aimez votre métier de technicien forestier ?
Tout d’abord la passion de la forêt évidemment. Mais aussi le fait d’être autonome, indépendant. Et la spécificité du travail dans ma coopérative forestière fait que je ne travaille pas sur la même forêt tout le temps. Je vais démarcher les propriétaires à plusieurs dizaines ou centaines de km. Le fait que ce ne soit pas une routine me plaît beaucoup. Et je ne voulais pas travailler enfermé dans un bureau toute la semaine. Là je fais moitié – moitié, entre terrain et bureau, et cela me convient.
Et concrètement si vous deviez décrire les principales tâches que vous effectuez au cours d’une semaine type ?
Les tâches varient vraiment en fonction des propriétaires et des forêts. Chaque propriétaire va avoir sa vision sur la gestion de la forêt qui a soit des peuplements différents, soit des potentialités différentes.
Je peux par exemple aller marquer une éclaircie avec un propriétaire. Cela consiste, à enlever les arbres gênants, ceux sélectionnés précédemment (arbres d’avenir) pour limiter la concurrence et laisser l’espace nécessaire au bon développement du houppier.
Je peux aussi donner des conseils sur le fonctionnement de la coopérative, donner des explications d’un point de vue législatif ou juridique, sur le fonctionnement de la forêt, ou sur les exonérations fiscales qui existent.
De part ma formation et ma licence professionnelle sur la gestion de l’eau, je peux aussi aller faire des relevés dans le cadre de la création d’une route forestière. Par exemple, lorsqu’on est confronté à un franchissement de cours d’eau, je vais analyser la profondeur et la largeur pour concevoir le meilleur ouvrage.
Je peux aussi certains jours marquer des peupliers. Si un propriétaire veut les couper, je vais les cuber. C’est-à-dire que je mesure le diamètre et la hauteur en fonction des qualités. Ensuite j’envoie des comptes rendus aux propriétaires, les factures, les cubages…
On passe aussi des journées au bureau pour faire des documents de gestion. Lorsque les propriétaires ont des surfaces suffisantes (plus de 10 hectares), on peut faire des documents de gestion. Cela devient obligatoire au-delà de 25 hectares. On va sur le terrain faire une sorte d’inventaire des peuplements présents par parcelle. On doit décider, par exemple, d’une éclaircie dans 4 ans, une coupe dans 10 ans, la récolte dans 25 ans… On planifie donc les interventions en forêt et cela fait une feuille de route pour le propriétaire. C’est aussi une pièce indispensable pour toutes les demandes de subvention pour les travaux en forêt ; pour certifier que la forêt est gérée et que le propriétaire ne fait pas n’importe quoi.
Ce sont des tâches très variées. De plus, à la coopérative on travaille sur tout le département du Nord, et dans le Pas-De-Calais. Donc je peux très bien aujourd’hui être près de Maubeuge, et aller demain à Arras… C’est assez plaisant car on n’est pas toujours dans la même forêt et on voit des propriétaires et des forêts différentes, et chaque fois ce sont de nouveaux enjeux, une autre gestion…
Quel a été votre parcours et votre formation pour arriver à ce métier de technicien forestier ?
Je ne savais pas trop quoi faire quand j’étais au collège. J’ai fait plusieurs salons et portes ouvertes et j’ai rencontré un prof de bac pro qui m’a dit « le bac pro c’est bien si c’est ce que tu es sûr de faire à 99%, sinon il vaut mieux faire un bac scientifique et se spécialiser après avec un BTS ». J’ai donc fait un Bac S, suivi d’un BTS de gestion forestière au lycée forestier de Crogny près de Troyes. Il en existe une douzaine en France. J’ai choisi celui de Crogny car c’est le seul qui gère une forêt régionale, à 5 min de l’école, ce qui permet d’aller réaliser des travaux pratiques très facilement.
Après ces deux ans je voulais continuer mes études, je me suis donc spécialisé avec une licence professionnelle sur la gestion de l’eau et de la forêt. Cela a permis de faire la différence lors des entretiens d’embauche. Cette licence comptait 6 mois de cours, deux mois à l’université et 4 mois en lycée forestier, plus 16 semaines de stage. A l’issue de la licence je suis resté 3 mois en recherche d’emploi. J’ai envoyé beaucoup de candidatures spontanées et lorsque les réponses étaient négatives, je demandais les coordonnées de personnes qui pourraient être intéressées.
Quelles sont pour vous les qualités requises pour exercer votre métier de technicien forestier ?
Il faut vraiment être passionné par la forêt. Il faut aussi être ouvert, diplomate et savoir s’adapter aux différentes situations sur le terrain. On peut en effet être dans la même forêt mais avec deux propriétaires différents. L’un peut être pro-chasse et l’autre préservation de la nature. On se retrouve avec des orientations différentes et on ne peut pas arriver avec un modèle précis que l’on veut imposer au propriétaire.
Il faut aussi être autonome car on est seul sur le terrain. Personnellement, je gère mes semaines tout seul. On se retrouve le lundi pour dire ce que l’on va faire et comment on va avancer sur les dossiers, mais sinon je n’ai pas d’horaires fixes. C’est donc à moi de faire mes journées, les remplir et avoir du boulot. C’est super pour quelqu’un qui est passionné, il va y passer tout le temps qu’il veut. Pour des personnes moins carrées ou moins passionnées, ils partiront du bureau dès que l’heure arrivera, sans problème. Cela dépend de la philosophie de chacun. Personnellement je débute, je ne suis pas encore efficace à 100%. Donc j’ai tendance à faire plus d’heures que la normale. Mais il faut aussi savoir relâcher un peu si on ne veut pas y passer toute notre semaine.
Si vous aviez quelque chose à changer dans votre métier de technicien forestier ce serait quoi ?
Par rapport au temps que l’on passe au bureau, je consacre la moitié du temps aux aspects techniques, qui restent dans notre domaine de compétence et sont la continuité du travail sur le terrain. Mais l’autre moitié est beaucoup administrative : remplir les devis, les factures… Et pour ce qui est des demandes de subventions et de programme aidés, il y a trop de pièces à fournir pour justifier le tout. Donc c’est un peu lourd, on passe beaucoup de temps au bureau. Le point à améliorer serait de diminuer un peu la charge administrative.
Quels conseils donneriez-vous à un jeune qui veut faire votre métier de technicien forestier ?
Je leur conseille de faire du bénévolat, ou partir faire des stages ou des jobs d’été dans le milieu forestier, pour vraiment voir si c’est cela qui leur convient. Personnellement, j’ai participé à des chantiers bénévoles en suisse dans une association.
J’avais fait un chantier une semaine et j’ai attrapé une maladie assez grave. J’ai loupé les cours pendant 5 semaines et quand je suis revenu, tout le monde pensait que je serai dégoûté de la forêt, mais pas du tout ! Il y a certaines maladies dont il faut se méfier mais cela m’a conforté dans mon choix et m’a permis de vraiment voir ce qu’est le travail d’ouvrier et de technicien. J’ai pu affirmer mon choix et le défendre par la suite, dans les lettres de motivations pour les écoles. Lorsqu’on cherche un emploi, si on s’est investi à côté dans des milieux associatifs ou autres, cela montre notre motivation.