Maxim est régisseur général, superman de l’ombre de la production audiovisuelle

22/09/2017 7 minutesPartager sur

régisseur général

Maxim est régisseur général, un métier méconnu mais indispensable au bon déroulement d’un tournage. Il a accepté de répondre à nos questions sur sa formation et son métier au quotidien.

 

Pouvez-vous expliquer aux 14-25 ans en quoi consiste le métier de régisseur général ?

« C’est le bras droit du producteur : il se charge de toute la logistique d’un tournage. »

Le régisseur général est là pour gérer l’organisation et assurer un maximum de confort sur le tournage. Pour commencer, lui ou un membre de son équipe est chargé des enlèvements et retours de matériels techniques chez les loueurs, artistiques comme récupérer les costumes des comédiens ou encore de faire les courses pour alimenter sa table régie sur le plateau et offrir un petit déjeuner à l’équipe avant de tourner.

Autre exemple, en lien avec la préfecture de police ou la mairie, il s’occupe de réserver des places de parking pour les véhicules techniques, ou encore planifie l’heure et le lieu de déjeuner des équipes. Le projet sur lequel je travaille en ce moment dure un mois mais le temps varie selon l’importance du tournage.

 

Avez-vous une journée type ?

Chaque jour est différent mais habituellement, le régisseur général prépare la journée suivante. Par exemple, il doit contacter le ou les propriétaires des lieux de tournage du lendemain pour être sûr que la personne qui loue le décor est bien informée sur l’organisation à venir. C’est un chef d’équipe, il délègue donc beaucoup à son équipe pour pouvoir accomplir sa mission mais il lui arrive aussi d’être sur le plateau.

Les tâches de la régie y sont variées. Cela va de conduire tout le monde sur le tournage à préparer la loge des comédiens (maquillage, costumes…). Régulièrement, mon équipe et moi sommes aussi amenés à bloquer la circulation et à avertir le voisinage du tournage. Il faut penser à beaucoup de choses pour faciliter le travail de tous et savoir faire face aux imprévus comme une coupure de courant.

En ce qui concerne les horaires, je travaille minimum huit heures par jour mais cela peut varier selon les aléas rencontrés. Il m’est souvent arrivé de travailler sur des projets à petit budget où je dormais moins de 5 heures par nuit. Bien entendu, les horaires sont beaucoup plus respectés lorsque l’économie du projet est confortable.

 

Alors qu’est-ce qui fait que vous aimez votre métier ?

« La gestion des imprévus apporte de l’adrénaline, c’est ce qui est le plus motivant. »

La régie pour moi c’est de la production, un projet commun. Ce qui est gratifiant, c’est le rendu final, j’ai envie qu’on fasse de belles œuvres audiovisuelles et dans le plus grand confort possible. Certes je ne suis pas celui qui participe directement à la création artistique mais s’ils réussissent ce projet c’est aussi grâce à mon équipe et moi. Nos collègues ont parfois des demandes tellement inattendues que tu te dis que tu es un peu « superman » quand tu es régisseur général. Ce que j’aime aussi, c’est le fait de prendre soin de tout le monde, l’aspect humain est très important dans ce métier.

 

Quel a été votre parcours pour exercer le métier de régisseur général ?

Il n’y a pas de cursus type pour être régisseur général, c’est principalement de l’humain, des rencontres et de la motivation parce qu’on est nombreux à vouloir faire ce métier. J’étais projectionniste bénévole dans un cinéma lorsque j’étais au lycée. Je me suis intéressé au métier de producteur et j’ai fait une école de commerce. Cette école m’a appris le management, la gestion de projet, à faire un business plan et la vente. Connaissances que j’adapte aujourd’hui à la production et la régie.

Suite à cela, j’ai fait plusieurs stages dans le cinéma à différents postes. J’ai été assistant de Prod’/Régie pour les émissions « Le Before du Grand Journal » et « La Nouvelle Edition » , c’était mon stage de fin de formation « Production des Médias Audiovisuels » (Sup de Pub). Il y a une vraie frontière difficile à franchir entre fiction et télévision. Les pros te collent une étiquette lorsque tu as mis les pieds dans un de ces deux milieux.

Aujourd’hui, cette séparation s’estompe mais il est vrai que la manière de travailler n’est pas la même. Pour ma part, j’ai découvert sur les plateaux TV un autre aspect de la régie qui m’a aidé une fois que je me suis tourné vers la fiction. Sur une émission quotidienne, la contrainte reste la même que sur un film : le temps. J’y ai appris que tout problème a toujours une solution. Même dans l’urgence. Et surtout, à gérer réflexion et impulsion. Parfois, il est bon de réfléchir 5 min avant d’agir et d’autre fois il faut foncer.

 

Quelles sont les principales qualités pour exercer votre métier de régisseur général ?

L’anticipation et l’observation, par exemple, remarquer qu’un technicien a branché une batterie près de la machine à café et que cela est potentiellement dangereux.

« Il y a une qualité humaine indéniable à avoir. Il faut savoir gérer le stress mais aussi être en bonne forme physique. »

D’autres qualités importantes : avoir du sang froid, rester calme, être adaptable, optimiste (nous trouvons toujours une solution à toutes les problématiques rencontrées, savoir-faire du café (où comment satisfaire toute l’équipe dès le matin) ou encore avoir de la mémoire pour la bière de fin de journée (moment sacré où l’on rencontre vraiment les membres de notre équipe et créons des liens) !

 

Et s’il y avait quelque chose à changer dans la profession de régisseur général, ce serait quoi ?

Sur un tournage, le temps est compté. Il y a donc un rythme assez militaire. Tout le monde doit être très bon à son poste. Comme dit le dicton : « la force d’une chaîne dépend de son maillon le plus faible ».

Cependant, il n’est pas rare que l’équipe régie se fasse « engueuler » quand un imprévu se présente et que le stress commence à affecter l’équipe. Sur le moment, ils ne comprennent forcément pas tout ce que nous avons à gérer, ce que nous avons déjà anticipé et tous les efforts que nous faisons pour le film. C’est pour cela que j’aimerais changer le regard de mes collaborateurs sur notre métier de régisseur. Les amener à mieux connaître et comprendre l’importance de notre rôle.

 

Auriez-vous une anecdote à raconter aux jeunes ?

Une chose est sûre. En régie, tu fais le plein d’anecdotes.

Pour le décor d’un court-métrage, je me suis lancé à la recherche d’un crucifix. C’était un détail, le plan était très court, mais cet accessoire servait à définir l’un de nos personnages uniquement en faisant parler l’image (il était pasteur). J’ai donc été à l’église dans l’espoir d’en emprunter un mais elle était fermée. Puis, j’ai cru avoir enfin accompli ma quête lorsque j’ai croisé un groupe de scouts. En vain. Le réalisateur était prêt à abandonner l’idée. Dernière chance, je suis parti frappé à toutes les portes du village où nous tournions. Nous l’avons eu : la croix est dans le cadre ! Un voisin était spécialement rentré chez lui pour nous rapporter cet élément de décor.

Une des missions qui m’a aussi bien fait rire était pour une blague de seulement 10 secondes en intro de La Nouvelle Edition. Daphné Burki y évoquait un fait divers : une fromagerie de comté s’était fait voler une centaine de meules. Les malfaiteurs restaient inconnus. Pendant que l’animatrice évoquait l’info, deux chroniqueurs de l’émission avançaient à pas de loup derrière elle en faisant rouler une meule. Un humour simple et efficace. Eh bien il a fallu aller chercher cette meule de comté dans le centre de Paris. Ce jour-là, mon véhicule de régie était réquisitionné pour le sujet d’un(e) journaliste. C’est donc en autolib’ que j’ai transporté le fromage de 35kg. Il était confortablement installé, ceinture attachée, à la place du passager avant. Un moment lunaire 🙂

 

Quels conseils donneriez-vous à un jeune qui veut faire votre métier de régisseur général ?

Pour faire de la régie, je leur conseille d’assister à des tournages par tous les moyens possibles, de faire des rencontres, de garder le sourire et surtout d’avoir le permis de conduire (une compétence incontournable !)

 

Est-ce selon vous un métier d’homme ?

Pas du tout, je sors d’un tournage avec deux femmes chefs régisseuses.

« Aujourd’hui, il y a plus de femmes sur les tournages, que ce soit sur les métiers techniques ou sur la régie. »

 

 

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