- Pouvez-vous expliquer aux jeunes en quoi consiste votre métier de University Alliances Manager ?
Je suis responsable des relations et des partenariats avec les écoles chez SAP, autrement dit « Université Alliances Manager ». Ce poste a été créé pour permettre aux entreprises de repérer des talents et d’accompagner les professionnels de l’enseignement dans leur cursus pédagogique. Nous avons créé ce programme il y a plus de 15 ans, et à l’époque, nous avons mis l’accent sur le contenu pédagogique des programmes car c’était nouveau pour tout le monde, on parlait à peine ERP, c’est un marché qui recrutait déjà énormément à l’époque, et ça continue, les métiers du digital sont des métiers d’avenir. Ce type de programme a pris de plus en plus d’ampleur, dans les sociétés et chez les éditeurs informatiques tels que SAP, IBM, Microsoft. La plupart du temps, le campus manager est rattaché aux ressources humaines, mais chez SAP, il travaille au sein de l’organisation Produits et Innovations. Nous sommes très impliqués dans l’enseignement et nous mettons du matériel pédagogique à disposition des écoles et des universités, et nous travaillons de plus en plus avec les primaires, les collèges et les lycées, c’est la tendance à venir, ça va faire partie du programme national français sur le développement et le code à partir de cette année. Un autre axe de mon rôle concerne l’événementiel, les étudiants participent de plus en plus à des challenges et ils sont amenés à innover avec SAP ou sur nos solutions. Nous sommes 80 Alliances Managers dans le monde, en charge de 140 pays, il n’y a pas forcément une personne par pays. En France et au Maghreb, il y a une ressource et demi, nous gérons cent partenariats avec des écoles, dont 40 plus actifs, à deux personnes. Nous avons de la chance d’être au moins deux en France, parfois il n’y a personne sur place.
- Concrètement, si vous deviez expliquer aux jeunes les principales tâches à effectuer au cours d’une semaine type, quelles seraient-elles ?
J’ai un rôle de consultant produit, c’est-à-dire que j’ai beaucoup d’entretiens avec des responsables de filières, des départements à propos de leur contenu. Ils m’exposent leur besoin, et je vais les conseiller par rapport à la connaissance de SAP et des solutions en fonction des sujets qu’ils veulent aborder puisque nous avons plus de 3000 produits. Il y a autant de besoins de l’autre côté, donc en tenant compte de toutes les facettes de l’offre du programme de partenariat, nous avons un catalogue assez vaste pour répondre aux attentes les enseignants. Je fais du conseil par rapport à l’exploitation et l’utilisation du programme et je gère la logistique événementielle pour les challenges étudiants (un par trimestre), ce n’est pas le plus gros de mon travail. Je gère ma communication en interne et en externe, tout ce qu’on crée, c’est grâce à un réseau interne ou externe, nous essayons de le faire connaître et le publier via les réseaux sociaux, l’animation des blogs, j’interviens également beaucoup lors de réunions de différents managers ou de services pour les impliquer davantage dans notre programme. Chez SAP, ça ne fonctionne que grâce au réseau et aux sponsors internes, humains plus que financiers, nous avons plutôt besoin de ressources et d’intervenants car nous pouvons avoir un budget très important mais si nous n’avons personne pour intervenir dans les écoles et animer des conférences, nous ne pouvons rien faire. Je précise que nous ne démarchons pas les écoles, c’est un besoin de leur part, nous préférons en fait créer des partenariats solides parce que nous savons que ça demande plus d’investissement de la part de l’école, au niveau humain, les professeurs doivent aussi se mettre à niveau et maîtriser l’environnement.
- Quel a été votre parcours pour arriver au métier de University Alliances Manager ?
Je suis rentrée chez SAP en alternance comme assistante de direction il y a 20 ans, déjà diplômée d’un bac + 2 en AES, c’était du provisoire pour moi, un moyen de payer mes études puisque je voulais retourner à l’université ou dans une école d’art. A l’époque, j’étais dans un esprit startup chez SAP, nous étions autonomes, j’ai eu rapidement des responsabilités et je me suis retrouvée en contact direct avec les clients, ça m’a plu dès le départ. J’ai eu des responsabilités dès ma prise de poste, on m’a fait confiance et je suis tombée amoureuse de ma société. J’ai pu évoluer sur différents postes, à savoir assistante marketing (administratif, régularisation des achats, comptabilité), premier contact externe, car il n’y avait pas internet à l’époque, SAP avait besoin de personnes pour répondre au téléphone, expliquer et envoyer de la documentation, chef de projet aux services généraux, responsable de site, acheteur Europe du sud et enfin consultante SAP, le métier qui m’intéressait le plus. J’ai implémenté les solutions SAP dédiées à la gestion des achats. J’ai la chance d’avoir eu un manager qui m’a fait confiance dès le début et qui m’a donnée l’opportunité d’exercer le métier de consultante. J’ai traité des achats pendant une dizaine d’années sur des solutions SAP (beaucoup d’audit interne, de discussion) et tant qu’on ne comprend pas le besoin du client, on ne peut pas implémenter la solution. Je suis encore consultante aujourd’hui sur les solutions dédiées aux écoles, universités et centres de formation.
- Faut-il un talent ou une qualité particulière pour exercer votre métier de University Alliances Manager ?
L’écoute, l’enthousiasme, c’est parfois laborieux de collaborer avec certains profils. Il faut être patient car nous sommes en perpétuel changement, se mettre à la place des écoles, des professeurs qui ont un rythme plus lent, et s’adapter, ça demande beaucoup de souplesse. Je n’ai plus vingt ans, mais il ne faut quand même pas que je fasse penser aux étudiants à leurs parents et leur dis que je peux les comprendre.
- Qu’est-ce que vous aimez particulièrement dans votre métier ?
Le contact avec les jeunes, j’en apprends tous les jours sur eux, je suis bluffée d’ailleurs par leur maturité, je ne pense pas que nous l’étions autant à leur âge, il y a un vrai décalage, j’ai envie de leur dire quand même de profiter de leur jeunesse. Aujourd’hui, vous ne pouvez pas vous projeter plus de 5 ans professionnellement. L’économie se transforme, il y a de nouveaux métiers. Je suis la première à avoir changé de travail et je suis pourtant quelqu’un de stable. Parfois, je leur dis : « Ne vous projetez pas au-delà de cinq ans. »
- Et si vous aviez une chose à changer, ce serait quoi ?
Je trouve qu’en France, du fait qu’on mise tout sur le diplôme et l’école, les étudiants ne sont pas suffisamment curieux, il faut avoir fait la bonne école, avoir le bon diplôme. Les jeunes ne se mettent aucune pression et beaucoup d’entre eux ne se sentent pas en concurrence avec d’autres profils à partir du moment ils sont dans une des meilleures écoles. Ils n’ont pas la curiosité de voir au-delà de leur filière. Ils se cantonnent à ce qu’on leur enseigne et attendent que les professeurs fassent tout le travail pour eux, hélas, il y a un décalage entre l’enseignement et la réalité, dans le monde du digital, souvent je leur montre de nouvelles solutions et ils pensent que c’est le futur, or ça existe déjà depuis 5 ans, ils s’assoient sur leurs diplômes, ça va leur jouer des tours car en face d’eux, dans les pays émergents, les étudiants se forment un maximum sur les nouvelles solutions. Chez SAP, il y a une quarantaine de nationalités différentes rien qu’en France, par manque de ressource, parce qu’il y a des profils qui étaient plus inspirants à un moment donné.
- Est-ce que vous avez une anecdote à nous raconter ?
Quand les étudiants m’interrogent par rapport à mon parcours et qu’ils me demandent quel diplôme j’ai obtenu, ils sont perturbés car ça casse tous leurs principes, j’en joue un peu d’ailleurs, je leur explique qu’on ne peut pas se projeter au-delà de 5 ans et c’est notre vie active qui détermine nos expériences. Quand on grimpe les échelons, on croise souvent les mêmes personnes quand on redescend, il ne faut pas les snober en montant, être bienveillant parce que le monde est petit. Au salon du numérique par exemple, il y a toujours un ancien collègue derrière un stand, un ancien partenaire, ou un étudiant qu’on aurait croisé, il faut donc être constant dans son métier.
- Avez-vous un conseil à donner à un jeune qui aimerait faire le métier de University Alliances Manager ?
Il faut être curieux des autres mais aussi sur sa société.
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