Juliette fait partie de la communauté #LesIntrépides, ces femmes qui évoluent dans des secteurs qui manquent des talents féminins !
Pouvez-vous expliquer aux filles en quoi consiste votre métier de conseil en logistique urbaine ?
Grace à mon parcours professionnel, je travaille aujourd’hui dans le métier de la logistique urbaine. A l’origine je suis diplômée de Sciences Po, avec une spécialisation en marketing. Quand j’ai commencé à chercher du travail, mon professeur de marketing à Sciences Po m’a dit : « N’oubliez pas de contacter la SNCF, il y a des postes très intéressants. »
«J’ai donc choisi de rejoindre cette grande entreprise, notamment parce que c’était celle qui pratiquait des salaires égaux hommes – femmes.»
J’ai fait du marketing à la SNCF mais rapidement, on m’a confié des responsabilités de transport de fret, un secteur que je ne connaissais pas mais qui s’est vite avéré intéressant : au lieu d’avoir en face de moi le client voyageur qui achète son billet au guichet ou sur internet, je rencontrais les directeurs logistique de grandes entreprises comme Danone, ArcelorMittal, Lapeyre, etc… J’ai eu rapidement des responsabilités de direction d’équipe, par exemple de grandes gares de fret, et exercé des métiers qu’on ne réserve pas forcément à des femmes ; c’était très intéressant de travailler à la fois dans un monde industriel et avec des responsabilités rapides dès le début de ma vie professionnelle. J’ai ainsi fait une grande partie de ma carrière dans les métiers de transport de fret.
Aujourd’hui, j’ai créé mon entreprise de conseil en logistique urbaine parce que je me suis aperçue qu’il y avait un besoin d’apporter des réponses en matière de transport de fret à destination des grandes villes, qui soient différentes du « tout camion ». On peut aussi faire de la péniche, du train, combiner le train et les camions électriques… Ce sont des choses auxquelles je crois beaucoup et que je conseille maintenant à mes clients ; ceux ci peuvent être soit institutionnels (les grandes métropoles, les aménageurs) ou privés (la grande distribution, les grandes entreprises de logistique etc…). Je travaille seule aujourd’hui, ma structure est légère contrairement à ma vie d’avant où je dirigeais des équipes de 800 personnes… Mais lorsque je réponds à un appel d’offres, il m’arrive de m’associer avec des partenaires qui proposent une expertise complémentaire à la mienne. Ma structure de conseil unipersonnelle me permet ainsi de proposer des prix compétitifs.
Avez-vous une journée type ?
Oui, plus ou moins. Mon métier consiste dans un premier temps à aller chercher les clients, je les rencontre, découvre leurs besoins, participe à leurs réunions. Ensuite, je peux répondre à un appel d’offres, préparer le pitch pour le client ou être sur le terrain puisqu’il faut bien connaître ses installations, le marché auquel il s’adresse, ou la ville dont on parle. Je suis à la fois à mon bureau et beaucoup dehors. Pour vendre de la logistique, il faut savoir parler le même langage que son interlocuteur !
Pourquoi aimez-vous votre métier de conseil en logistique urbaine ?
J’aime comprendre les besoins, les contraintes de l’entreprise qui fait appel à moi et appréhender les marchés sur lesquels elle intervient. Cette recherche m’intéresse beaucoup parce qu’elle est variée. Je peux travailler par exemple pour une entreprise du BTP, un transporteur frigorifique …ou encore pour une mairie, une grande métropole qui réfléchit à une nouvelle organisation de logistique urbaine. C’est un bon « remue- méninges », c’est beaucoup plus passionnant que d’être dans un secteur monotypé !
Quelles qualités faut-il pour exercer votre métier de conseil en logistique urbaine ?
Il faut bien sûr un bon contact commercial, renforcé par des connaissances solides du monde du transport : j’ai parfois face à moi des experts, qui peuvent être très spécialisés (supply chain etc…). Il faut savoir les rassurer, mais également les amener à réfléchir à de nouveaux modes d’organisation.
Il faut aussi avoir beaucoup de curiosité, et de la rigueur pour préparer une proposition convaincante. C’est important d’être assez réactif car les besoins parfois sont urgents, il faut avoir de bonnes connaissances en marketing et savoir synthétiser rapidement.
S’il y avait une chose à changer dans votre métier, ce serait quoi ?
D’une manière générale, je trouve que le transport de FRET est assez mal aimé. Il est méconnu, on en parle très peu dans les médias, alors que tout le monde commande par internet, demande que ses produits soient livrés dans les magasins en temps et en heure ou dans son usine pour bien réaliser le produit fini. C’est un sujet qui n’est jamais abordé alors qu’il est l’un des fondements de l’économie et a un impact fort en termes de développement durable. Par contre, dans les entreprises, les métiers de la logistique comme Directeur de la logistique et de la supply chain font de plus en plus partie des comités exécutifs des entreprises. A l’inverse de l’opinion publique qui continue à ignorer la logistique, les entreprises ont compris que c’était un facteur d’efficacité et de rentabilité.
Auriez-vous une anecdote à raconter aux filles ?
Oui, lorsque je dirigeais tout le secteur du fret dans le BTP pour la SNCF, j’ai succédé à un homme, ce qui arrive souvent, je me suis aperçue que tous les rendez-vous clients étaient à 11h30 parce que dans le secteur du BTP, le business se fait à table.
« Aussi j’ai voulu casser ces codes, en proposant des rendez-vous à 9h; j’ai rencontré pas mal de difficultés, cela surprenait un peu tout le monde. Finalement, mes clients ont trouvé que c’était une bonne idée, que c’était plus efficace en travaillant de cette façon… »
Il ne faut donc pas hésiter à changer les habitudes et les comportements !
Lorsque vous dirigiez jusqu’à 800 personnes, avez-vous rencontré des difficultés à vous imposer dans le secteur ?
Non, pas vraiment car même si ce sont des métiers masculins, lorsqu’une femme arrive, les collaborateurs apprécient ce changement ! Ils sont plutôt contents s’ils s’aperçoivent que les métiers industriels, le business de l’industrie, ou le B to B, vous passionnent. Si vous êtes compétente dans ce domaine-là, vous avez tout de suite de la respectabilité. Dans le management d’équipes, il faut savoir se faire respecter.
« Je conseille aux filles de ne jamais laisser passer quelque chose qui n’est pas normal. »
Par exemple, j’ai eu un collaborateur qui à un moment donné, pour me répondre, m’a dit : « Ecoute, ma petite …», il n’aurait jamais dit cela à un homme. Il ne faut pas se laisser faire même s’il s’agit d’un N+1. Il faut tout de suite faire une remarque ferme sans pour autant être hyper revendicatrice.
Quel conseil donneriez-vous à une fille en terme de formation ?
Après ma maîtrise de gestion, j’ai eu une formation plutôt généraliste à Sciences Po Paris. C’est utile car dès qu’on a des responsabilités, on doit savoir manager, faire faire des analyses de marché, rédiger des notes, donc si l’école n’est pas trop spécialisée, on est préparé à cela. Dans le monde du transport, on a le plus souvent face à soi des experts. Les étudiantes qui ont fait des écoles spécialisées dans le transport devraient donc trouver du travail rapidement, c’est un secteur qui est demandeur, même si elles ne sortent pas d’HEC ou de l’ESSEC. Le secteur évolue beaucoup aujourd’hui avec internet et la création de nouveaux entrepôts logistiques très performants. Une jeune femme compétente aussi en informatique trouvera facilement du travail dans la logistique. Les filles qui ont plutôt un profil technique ou ingénieure, qu’elles n’hésitent pas à penser au secteur de la logistique.
« Je leur conseille d’opter pour un profil généraliste ou d’aller vers des écoles intéressant davantage les garçons parce qu’elles auront plus de chances d’être embauchées, et feront la différence, surtout si les entreprises cherchent à féminiser leurs équipes»
Quelle est la place des filles aujourd’hui dans votre secteur ? Comment voyez-vous les choses évoluer ?
Je pense que le secteur évolue dans le bon sens. C’est vrai qu’Il y a beaucoup de femmes qui travaillent dans les transports de voyageurs comme il y a beaucoup de femmes qui veulent rentrer dans le secteur de la mode ! Il n’y a par contre pas beaucoup de femmes dans le transport de fret mais on commence pourtant à en trouver sur des postes importants. Par exemple, la directrice du FRET en ce moment à la SNCF est une femme. On commence à voir des directrices de la supply chain. Donc il y a une place à prendre.
« Je pousserais les jeunes femmes que ce monde-là intéresse où qui ne le connaissent pas, à rejoindre ce secteur car c’est un monde qui embauche. »
Amazon est en train d’ouvrir d’immenses plateformes en France, il est évident qu’ils vont recruter. C’est plutôt les garçons qui vont se présenter, j’en suis sûre, alors que ce ne sont plus des métiers physiques, tout est informatisé, on n’a plus besoin de force, donc les filles, lancez-vous !
…Ou contacte d’autres femmes du secteur Logistique sur le groupe #LesIntrépides !
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